Un jour, un projet : Rénovation de Yongqing Fang dans le district d’Enning Road par Lab D+H

Lab D+H - Alleyways par Arch-Exist
Photographie d'Arch-Exist

Premières neiges, un an de gilets jaune et séisme en Rhône-Alpes…on peut le dire, la semaine dernière a été chargée en émotions. De surcroît, on y ajoute un dérapage vulgaire autour de la réparation de Notre-Dame de Paris et on tient notre champion de la semaine.
Alors évidemment, il n’est pas question pour les architectes, jeunes ou moins jeunes, de « fermer leur gueule ». Au contraire.
Voici un bel encouragement pour l’ouvrir encore plus !

Mais le sujet de ce blog n’est pas là (pas encore).
Non non non, ici, on parle surtout de…*roulement de tambour* l’Architecture !
Enfin architecture et urbanisme, parce que quoi qu’on en dise, les deux champs sont intimement liés. L’un de mes professeurs m’expliquait que si l’urbanisme était un gant, l’architecture était la main qui venait s’y glisser. L’un comme l’autre doit alors s’y ajuster pour se compléter.

Cette longue introduction faite, nous partons en Chine, dans la ville de Guangzhou et plus particulièrement pour Yongqing Fang dans le district d’Enning Road. Ce lieu est notamment connu pour y accueillir l’ancienne résidence de Bruce Lee (rien que ça) ainsi que ces nombreux lieux branchés (coucou la gentrification) insérés au milieu d’un tissu urbain plus historique.

Le projet d’aménagement urbain de Lab D+H traite de manière centrale cette question de la métamorphose d’un quartier. L’une des craintes justifiées des concepteurs fut de ne pas subir les travaux dits de modernisation du quartier en poussant au-dehors ces habitants historiques pour les remplacer par une population plus aisée. Sur de tels sujets, j’ai forcément pensé à la série grivoise South Park dont l’épisode « The City Part of Town » (S19/E3) traite des dérives de la gentrification. Alors oui, quand on parle gentrification, on peut prendre le raccourci et penser à la dénaturation systématique de quartiers emblématiques par des copier / coller de modèles mondiaux (avec les petits artisans hors de prix, le café façon Starbucks revisité et le burger végane). On peut aussi, et c’est ce que je vais faire, se contenter d’apprécier le traitement de l’espace urbain, en se disant que les lieux deviendront ce que les gens décident d’en faire.

Le projet se résume par différentes interventions, allant du détail de trottoir à l’escalier, répartie sur une large zone. C’est un véritable travail d’acupuncture auquel s’est livré le lab D+H, ponctuant les ruelles de manière mesurée pour en valoriser l’identité. On y retrouve trois matériaux : du bois, pour la chaleur qu’il dégage ; de la pierre, pour ce rappel aux bâtiments existants, en brique maçonnée ; puis le métal, avec notamment l’acier Corten dont la teinte effet rouille se prête au dialogue entre le bois et la pierre. Le tout est assemblé avec finesse, usant de motifs rectilignes ou courbés, sans trop en faire. À part deux ou trois jeux de lumière, notamment sur l’escalier un poil bling-bling à mes yeux, il ressort du projet une agréable sobriété. Le mobilier urbain s’insère parfaitement dans la fresque de l’existant, renforçant l’idée d’un lieu en mutation où peuvent se côtoyer les maisons traditionnelles abîmées et les bâtiments rénovés à grand coup de baies vitrées et de menuiseries métalliques noires. Les zones d’eau sont mises en scène par l’usage de la pierre et de la lumière, contribuant à nous offrir cette ambiance de sérénité.

Si conclusion il faudrait apporter, je dirais que plastiquement, le projet a tout pour séduire. L’aspect trop propre et fini, gommant chaque parcelle d’espace indéterminé par une fontaine ou une mise en lumière, peut cependant constituer une limite pour ces lieux en constante métamorphose. Face à cette propension à tout rationaliser et rentabiliser, ne devrions-nous pas tenter de préserver des zones non qualifiées ? Je reste aujourd’hui persuadé qu’il y a une nécessité de laisser la population passée ou future la possibilité de contribuer directement, physiquement, à l’aménagement de son lieu de vie. Pour qu’au lieu de ne faire que passer, nous ayons cette envie et cette possibilité d’Habiter.

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